Cette semaine, j'ai eu la surprise et la grande joie de recevoir des nouvelles d'une ancienne élève.
Est-ce que je me rappelle d'elle, plus de 10 ans plus tard ?
OUI ! parfaitement, même !
Je me rappelle de sa tristesse, de sa difficulté à s'intégrer dans le groupe classe, de son manque d'investissement dans le travail. Et surtout, je me rappelle de ses confidences au sujet de la violence au sein de sa famille.
Je me souviens d'avoir eu plusieurs fois envie de la prendre dans mes bras et de ne pas l'avoir fait : "cela ne se fait pas".
Je me rappelle mon impuissance à l'aider.
Je me souviens d'avoir ressenti, peut-être pour la première fois, ce décalage énorme entre les besoins de cette ado en grand manque de sécurité physique et affective, et ma mission : lui apprendre à additionner des fractions [entre autres savoirs tout aussi inutiles au quotidien].
Parmi les raisons qui m'ont fait quitter mon job de prof de maths, il y a tous ces élèves rencontrés dans ma carrière, tous ces enfants pour lesquels le système scolaire n'est pas adapté : les porteurs de troubles dys ou de l'attention, les ados cassés par la vie qui n'ont juste pas la disponibilité d'esprit nécessaire pour être attentifs, ceux qu'on n'entend pas, ceux qui s'ennuient ...
Tous ces élèves pour qui j'ai eu trop souvent le sentiment de ne pas en faire assez, d'être à côté de la plaque, de ne rien avoir à leur proposer ... et à qui j'ai tenté d'apprendre à utiliser un rapporteur !
Tous ces enfants, pour qui je me suis demandé quels adultes seront-ils demain ? Avec quelle estime d'eux-même vont-ils rentrer dans l'âge adulte ?
Chacun d'eux m'a fait réfléchir, apprendre, essayer, m'informer, lire, expérimenter ... partir.
Et choisir de mettre au coeur de mon activité professionnelle, au coeur de ma vie, le développement des compétences émotionnelles et sociales. Pour que chaque enfant grandisse en développant la conscience de sa valeur, en exprimant toute son unicité, et conserve la capacité à se construire une vie qui lui convienne.
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