NON, rien de rien, je ne regrette rien … (pour l’air dans la tête, ne me remercie pas, c’est cadeau!)
Le cadre dans lequel j’étais ne me convenait pas (pas plus qu’il ne convient aux élèves, mais ça , c’est un autre débat!).
Dès mes débuts à l’éducation nationale, j’ai fait des choix pédagogiques hors-norme, en évaluant sans note par exemple. Je me suis intéressée à la pédagogie Freinet, puis aux pédagogies actives en général. J’ai lu, beaucoup. Je me suis formée, aussi, à mes frais et pendant les vacances scolaires. J’ai imaginé, inventé, créé, expérimenté : des jeux mathématiques, du matériel Montessori, des plans de travail, des ateliers autonomes, des évaluations à la demande … J’en oublie certainement ! Cette réflexion didactique et pédagogique, cette influence des pédagogies « actives », m’a permis de proposer des supports d’apprentissages pertinents, innovants et de qualité, tout en donnant beaucoup de place au choix et à la responsabilité des élèves.
Les apports des divers pédagogues rencontrés n’ont pas été seulement en terme de matériel. Ils ont changé mon regard sur les enfants. J’ai pris conscience de l’adultisme dont je faisais preuve, j’ai pris du recul sur l’éducation que j’ai moi-même reçue, découvert d’autres manières de considérer les enfants, appris à aller au-delà de mes réflexes conditionnés.
De petits pas en grandes avancées, j’ai changé mon regard sur ma fille, mon fils, mes élèves et les enfants en général. J’ouvre aujourd’hui un regard plein de confiance sur chacun d’eux.
Évidemment, ma manière de communiquer a changé, vers davantage de respect et de considération, moins de jugement et davantage de curiosité.
Tout cela m’a demandé du temps, de l’investissement, de la réflexion, de l’énergie, pour mettre en place dans mes classes de collège un fonctionnement qui me ressemble davantage.
Mais je me suis heurtée aux limites du « système », en remettant en question des choses sur lesquelles un « simple » prof n’a pas de prise.
A la question « est-ce que j’aimerais que mes enfants vivent ce que vivent mes élèves aujourd’hui ? », ma réponse restait malheureusement non.
Parce que rester assis derrière sa chaise dans une salle trop petite n’est pas adapté à un collégien.
Parce qu’avec 30 enfants devant moi, seulement 55 minutes par jour, je n’avais pas la possibilité de les rencontrer réellement. De comprendre qui ils sont, ce qu’ils aiment, ce qu’ils vivent, la manière dont ils raisonnent, ce qui les mets en difficulté. Et donc pas la possibilité d’entrer en relation avec eux.
Parce que malgré tous les dispositifs mis en place, je continuais à ne pas réussir à tous leur permettre de dépasser leurs difficultés. J’avais le sentiment de les abandonner, de ne jamais faire assez, de ne pas avoir de solution pour eux.
Parce que malgré mes multiples heures bénévoles, je ne trouvais que trop peu de temps à consacrer au principal : le développement des compétences psycho-sociales des élèves. Je passais à côté de l’essentiel.
Le premier confinement lié au Covid m’a fait réaliser le mal être dans lequel j’étais et l’écart entre mes convictions et les attentes de l’éducation nationale. J’ai choisi de demander une disponibilité car elle était de droit et me permettait d’avoir l’assurance de ne pas faire une année de plus.
J’ai dis au-revoir à mes collègues avec beaucoup d’émotion, à mon statut de fonctionnaire et au salaire associé avec de la peur et beaucoup d’excitation.
Ma première envie a été d’envoyer valser l’enseignement.
J’ai donné des cours particuliers parce qu’il faut bien gagner sa vie, instruis mes enfants nouvellement en instruction en famille … et renoué avec le plaisir d’enseigner.
J’ai retrouvé du temps pour imaginer, créer et animer des ateliers à travers lesquels j’exploite toutes mes compétences … et permets aux enfants d’exprimer leur plein potentiel.
J’ai pu m’investir dans l’école indépendante de la Ruche Bleue, découvrir le travail en équipe, continuer à avancer dans mes réflexions didactiques, éducatives et pédagogiques.
J’ai découvert les joies et les difficultés de l’entreprenariat, et développé plein de nouvelles compétences !
Alors NON, je ne regrette pas ce choix de quitter l’éducation nationale. Choix que je confirme d’ailleurs en posant ma démission (après 2 ans de disponibilité et 2 refus de rupture conventionnelle). La suite de ma vie professionnelle est encore floue, mes revenus sont nettement moindres et le montant de ma retraite sera sûrement ridicule …
Mais aujourd’hui, je suis vivante et pleinement actrice de ma vie, et ça, ça n’a pas de prix !
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